L’Union européenne envisage une surveillance renforcée des communications privées à l’horizon 2030, via le projet controversé ProtectEU, une initiative qui rappelle le défunt projet ChatControl. Quels sont les enjeux, les risques pour la vie privée et les réactions des experts ? On fait le point.
ProtectEU : un nouveau visage pour la surveillance des données
Le projet ProtectEU, soutenu par plusieurs États membres de l’Union européenne, vise à permettre aux autorités de déchiffrer les communications chiffrées de bout en bout — telles que les messages échangés via WhatsApp, Signal ou Telegram.
L’objectif officiel est de lutter contre les contenus pédocriminels en ligne (CSAM), une mission noble en soi, mais qui soulève des inquiétudes majeures quant au respect de la vie privée des citoyens européens.
Une redite du projet ChatControl ?
Pour les observateurs critiques, ProtectEU est ni plus ni moins que la suite déguisée du projet ChatControl, rejeté à plusieurs reprises pour son caractère intrusif. ChatControl proposait de scanner automatiquement tous les messages et fichiers privés des utilisateurs à la recherche de contenus illégaux, menaçant ainsi le chiffrement de bout en bout.
ProtectEU reprend cette logique en proposant des outils d’analyse automatisée (souvent appelés client-side scanning) pour inspecter les données avant même leur chiffrement.
Les dangers pour la vie privée et les libertés fondamentales
Plusieurs associations de défense des droits numériques, comme la Quadrature du Net ou EDRi, dénoncent ProtectEU comme une atteinte grave aux libertés individuelles :
- 📵 Fin du chiffrement de bout en bout : les messages seraient analysés avant d’être chiffrés, ce qui revient à installer un espion dans chaque téléphone.
- 🔓 Création de failles de sécurité exploitables par d’autres acteurs malveillants.
- 🕵️♂️ Risque de dérives vers une surveillance généralisée de la population, même sans justification judiciaire.
- 📉 Affaiblissement de la sécurité numérique en Europe : les entreprises et les journalistes verraient leur confidentialité menacée.
Un rejet massif des citoyens et des experts
De nombreux experts en cybersécurité, universitaires et ONG ont tiré la sonnette d’alarme. Ils affirment que les technologies proposées ne sont ni fiables ni proportionnées, et qu’elles ouvrent la voie à une surveillance de masse, incompatible avec les principes démocratiques de l’Union européenne.
Une pétition contre le projet a déjà recueilli des milliers de signatures, et plusieurs eurodéputés ont exprimé leurs réserves.
Vers une réglementation de la surveillance automatisée ?
Si la protection de l’enfance reste une priorité légitime, la solution ne peut pas être de sacrifier la vie privée de tous. De nombreuses voix demandent une approche ciblée, avec des mesures proportionnées, transparentes et respectueuses du droit à la confidentialité.
Conclusion : Faut-il craindre une fin des communications privées en Europe ?
Le projet ProtectEU, sous couvert de sécurité, pourrait bien marquer une étape dangereuse vers une surveillance de masse en Europe. Si le texte devait être adopté dans sa version actuelle, il ouvrirait la voie à une déconstruction du chiffrement tel qu’on le connaît aujourd’hui, mettant en péril la vie privée de millions de citoyens.
➡️ Les prochains mois seront décisifs. Les débats au Parlement européen s’annoncent houleux. En attendant, la vigilance citoyenne reste essentielle.